Une passion pour le fait divers et une question: l'inné et l'acquis. L'hystérie féminine, la punition, la guérison. Voilà ce qui a mené des tonnes de personnes de nationalités, sexes, âges et horizons différents à s'agglutiner devant le Musée d'Orsay, à patienter en file pendant d'interminables minutes devant la salle de l'exposition et à se bousculer pour voir les peintures de Gustave Moreau, les dessins de Victor Hugo, les photos et reproductions à la cire de visages de condamnés.
C'est que Violette Nozière, L'amante anglaise, Abel et Caïn font partie de notre histoire tant ils nous dégoûtent, tant ils nous ressemblent.
Alors on a les yeux qui brillent et le ventre noué. On regarde Lady Macbeth avec une larme complice. On voit des photos et des mesures qui nous glacent d'effroi. On est face à la veuve noire, à la coupeuse de têtes en série, et on tremble.
Mais il était temps d'en parler artistiquement et non plus mécaniquement. Le viol de Degas, le choix, l'ambiguïté. La sortie impossible.
I
Race d'Abel, dors, bois et mange ;
Dieu te sourit complaisamment.
Race de Caïn, dans la fange
Rampe et meurs misérablement.
Race d'Abel, ton sacrifice
Flatte le nez du Séraphin !
Race de Caïn, ton supplice
Aura-t-il jamais une fin ?
Race d'Abel, vois tes semailles
Et ton bétail venir à bien ;
Race de Caïn, tes entrailles
Hurlent la faim comme un vieux chien.
Race d'Abel, chauffe ton ventre
À ton foyer patriarcal ;
Race de Caïn, dans ton antre
Tremble de froid, pauvre chacal !
Race d'Abel, aime et pullule !
Ton or fait aussi des petits.
Race de Caïn, cœur qui brûle,
Prends garde à ces grands appétits.
Race d'Abel, tu croîs et broutes
Comme les punaises des bois !
Race de Caïn, sur les routes
Traîne ta famille aux abois.
II
Ah ! Race d'Abel, ta charogne
Engraissera le sol fumant !
Race de Caïn, ta besogne
N'est pas faite suffisamment ;
Race d'Abel, voici ta honte :
Le fer est vaincu par l'épieu !
Race de Caïn, au ciel monte,
Et sur la terre jette Dieu !
Baudelaire
C'est que Violette Nozière, L'amante anglaise, Abel et Caïn font partie de notre histoire tant ils nous dégoûtent, tant ils nous ressemblent.
Alors on a les yeux qui brillent et le ventre noué. On regarde Lady Macbeth avec une larme complice. On voit des photos et des mesures qui nous glacent d'effroi. On est face à la veuve noire, à la coupeuse de têtes en série, et on tremble.
Mais il était temps d'en parler artistiquement et non plus mécaniquement. Le viol de Degas, le choix, l'ambiguïté. La sortie impossible.
A passion for crime and a question: nature or nurture? Feminine hysteria leads to punishment in order to CURE, or else? Those topics lead loads and loads of people from various origins to crowd in front of the Musée d’Orsay, to wait for endless minutes in front of the exhibition, to fall over each other in order to see Gustave Moreau’s paintings, Victor Hugo’s drawings, the pictures and wax reproduction of the faces of the convicted.
Jack and Hyde are like Abel and Cain: a part of our History, a part of us that disgusts us for being so close to us.
And it’s with icy fingers and darkened eyes we watch Lady Macbeth, shredding tears of complicity. And it’s in a state of shock we realize what the measurement mean. And it’s on the verge of fainting we see the height of the serial head chopper, her wooden structure and metal power.
So it’s with a sigh of relief we acknowledge the artistic treatment of something that is neither mathematical nor simple. Rape by Degas, the ambiguous quality and the impossible issue.
I
Race d'Abel, dors, bois et mange ;
Dieu te sourit complaisamment.
Race de Caïn, dans la fange
Rampe et meurs misérablement.
Race d'Abel, ton sacrifice
Flatte le nez du Séraphin !
Race de Caïn, ton supplice
Aura-t-il jamais une fin ?
Race d'Abel, vois tes semailles
Et ton bétail venir à bien ;
Race de Caïn, tes entrailles
Hurlent la faim comme un vieux chien.
Race d'Abel, chauffe ton ventre
À ton foyer patriarcal ;
Race de Caïn, dans ton antre
Tremble de froid, pauvre chacal !
Race d'Abel, aime et pullule !
Ton or fait aussi des petits.
Race de Caïn, cœur qui brûle,
Prends garde à ces grands appétits.
Race d'Abel, tu croîs et broutes
Comme les punaises des bois !
Race de Caïn, sur les routes
Traîne ta famille aux abois.
II
Ah ! Race d'Abel, ta charogne
Engraissera le sol fumant !
Race de Caïn, ta besogne
N'est pas faite suffisamment ;
Race d'Abel, voici ta honte :
Le fer est vaincu par l'épieu !
Race de Caïn, au ciel monte,
Et sur la terre jette Dieu !
Baudelaire
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