Et c'était pourtant mal parti. Une place dont le prix double parce que je n'ai plus le bénéfice étudiant, une pluie gluante, un accueil glacé, un "mademoiselle, pardon: madame", un "laissez les premiers rangs aux lycéens qui ricannent", une petite salle, un radeau de la méduse en noir - scotch - et blanc, une bougie, une parodie de Tokyo Hotel et une seule actrice.
Et c'était assez audacieux. Encore Tartuffe, un texte si connu qu'on pourrait le réciter avec les acteurs, avec la même impression de saisissement désarçonnant que lorsqu'on se retrouve à marmonner de façon synchrone les délires organisés du prêtre après dix ans loin des bancs de l'Eglise.
Et c'était déstabilisant, avec ce jeu sur le noir et la lumière qui aurait presque pu rappeler une scène culte des Visiteurs: un autre classique français?
Mais on était plutôt bien, avec mes deux D., dont celui qui fait des sons (je vous en avais déjà parlé mais que pour MTO parce que je ne connaissais pas encore ses putes à vélo).
Et la justesse d'un jeu sans concession, cette façon dont Molière gros gras caricatural et fou du roi souligne certains travers intemporels et laisse la place à toutes les interprétations du vice: fantasme de l'inceste, du viol, d'une déprise de soi, d'une emprise sur l'autre et d'une exhibition de pulsions dominatrices.
Et les coupures honnêtes du texte, la façon dont cette liberté respecte plus l'auteur que toutes les mises en scènes traditionnelles et toutes les gammes d'alexandrins sacrés des classiques.
Et l'impossibilité d'assister sagement à la pièce, les noeuds de l'estomac, l'authenticité des sentiments mis en jeux, la perversion du sous entendu quand il se voit.
L'oeil ébloui, le poil dressé, la salle met un certain temps à lancer la machine à applaudissements.
On dit bravo.
C'est jusqu'au 31 Octobre, au théâtre de la Bastille.
Et puis ensuite ce sera Bérénice d'après Racine
On ira aussi
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