J’ai acheté le premier exemplaire de Feuilleton le 30 septembre. J’étais de passage à la libraire de la Place de Clichy dans l’espoir d’y acheter un Lola Lafon. Il n’y avait malheureusement aucun livre de cet auteur en stock et je me trouvais donc dans l’obligation (j’ai peur des commerçants (c'est-à-dire que je ne dis jamais non)) de payer cinq euros d’acompte dans l’espoir de pouvoir un jour me plonger dans Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s’annonce, ouvrage fortement conseillé par Peggy S.
A défaut de repartir les mains vides, un peu désarçonnée à l’idée que personne ne prenne mes envies de tempête au sérieux, je me décidais à combler ma frustration par l’achat de papier imprimé. Je pensais aux magazines débordant des étagères de la librairie dans laquelle ma sœur m’avait emmenée à Seattle et me dirigeait vers ce coin minuscule, non loin de la caisse, où étaient entreposées les quelques revues vendues Place de Clichy. C’est qu’avec tous les kiosques débordant de journaux dans Paris, on n’a pas forcément besoin d’étagères bariolées dans nos librairies-sanctuaires. Et là, bien en vue, tout plein d’exemplaires de la revue XXI. Encore un complot universel me rappelant le retard culturel de ma personne, me dis-je en toute humilité. Non, je n’achèterai pas le numéro 15, je ne me ferai pas l’affront de reconnaître que jusque là, j’avais eu la flemme. Je n’admettrai pas que j’hésitais à investir autant d’argent dans un simple magazine.
Un peu plus loin, un autre format, des couleurs aussi. Feuilleton. Outre l’Union Jack trônant sur sa couverture, l’argument imparable, ce qui va déterminer mon achat : un beau numéro 1 qui s’affiche sur sa tranche. Au pire, il sera collector. Et puis ce premier article sur les conséquences économiques d’un séisme à Tokyo, paru pour la première fois dans Manhattan, Inc Magazine il y a vingt-deux ans m’intrigue. D’autant qu’il ne semble pas être la seule ligne éditoriale du truc que j’ai entre les mains.
Je lis, j’adore. Je pense égoïstement à moi, je me dis que j’ai trouvé un truc (tu vas voir, je galère pour trouver un terme capable d’exprimer ce que signifie Feuilleton), un truc qui me va bien. C’est varié, ça a des citations parfaites, c’est joli. Il n’y a aucun manifeste, aucune déclaration de guerre et pourtant, c’est là, c’est ça que je voulais lire en ce moment. Le truc va jusqu’à me dire comment me débarrasser des vers qui vivent dans les cèpes sans avoir à lutter avec un couteau contre mon aversion pour les choses de leur espèce (là, le terme c’est insectes (quoique je me demande si les vers sont des insectes)).
Il paraît que les fondateurs ne sont pas des débutants. Très bien. J’avoue que je m’en fous, que je ne vois qu’une chose: je veux lire un truc comme ça. Et je me dis, avant même de lire l’article de George Orwell sur les livres et les cigarettes, que mon histoire d’argent était débile, qu’investir 15 euros dans une mix-tape de textes, d’images, de recettes et de photo, c’est faire une bonne action pour moi. D’ailleurs, plus je lis et plus je pense aux personnes avec lesquelles je voudrais partager ma lecture, plus je me dis qu’on devrait tous trouver son Feuilleton, qu’on irait bien mieux si on faisait tous l’effort de participer à un truc comme ça.
Et je ne sais pas trop pourquoi, mais quand je vois mon exemplaire émerger sous les coussins de mon canapé ou sur une étagère de ma cuisine, là où je l’ai laissé entre deux lectures, je ne peux pas m’empêcher de sourire et de me dire que ma vie me va comme elle est. En attendant le prochain, j’irai peut être acheter un numéro de XXI, sûrement chercher mon Lola Lafon, éventuellement voir ce que Hey ! donne sur le papier et encore dévorer un Décapage.
PS 1: si tu cliques sur le titre du livre de Lola, tu pourras l'entendre lire et c'est beau.
PS 2: Peggy elle fait ça aussi (clique) (et j'aime beaucoup)
PS 3: Feuilleton se définit comme ça (et c'est bien)
Pourquoi ce titre ? Feuilleton est le titre de la rubrique culturelle des journaux allemands. Feuilleton trône en haut des pages culturelles comme sur d’autres les termes “Politique”, “Economie” ou “Sport”. Contrairement aux journaux français, les journaux allemands ont conservé le terme “Feuilleton”. Ces pages sont très populaires et contribuent fortement à l’image de marque d’un journal.
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